Demain, départ!
Petites réflexions en vrac :
- Comme je suis une fille extrêmement intelligente, j’ai voulu profiter des joies de la pluie alsacienne avant de partir. Mauvaise idée. J’ai le rhume le plus monumental de l’histoire de l’univers (oui, je sais, je dis ça à chaque fois que j'ai le rhume). Ici, ça dérange pas trop, ça fait assez en accord avec le climat local, mais flûte, quand je serai à 40 degrés à l’ombre là en bas, j’aurai l’air intelligente à me moucher toutes les 5 secondes et à avoir le nez en chou-fleur.
- J’aime pas faire les adieux aux gens. En fait, pas voir quelqu’un pendant 6 mois c’est pas tellement difficile, enfin ça dépend des gens, mais bon, c’est faisable, suffit de pas le voir un jour puis encore un autre puis encore un autre puis encore encore, et pof, ça fait 6 mois. (J’ai tout à fait conscience du fait que ma théorie est tout à fait incompréhensible mais dans ma tête ça a un sens tout ça).
Bref, le problème principal c’est quand tu dois dire au revoir à des gens, et qu’après ils te disent que tu vas leur manquer, ou à quel point ils t’aiment et te trouvent super géniale. On dit jamais aux gens qu’ont les trouve géniaux si on les revoit le lendemain, je crois que dans la société il y a une espèce de règle tacite qui fait que tu dis des trucs gentils aux gens seulement si tu vas t’en séparer, alors que les trucs méchants sortent très bien tout seuls spontanément. Doit y avoir un rapport avec l’instinct de survie là dedans, genre, on croit que si on dit des trucs gentils, on va se faire bouffer.
Mais moi j’aime pas qu’on me dise des trucs gentils, et je sais pas répondre aux compliments, j’ai toujours envie de dire aux gens que non, je suis pas jolie et gentille, en fait c’est une fausse impression, je suis une grosse emmerdeuse en vrai, demandez à ma maman, elle vous dira. La prochaine fois que je devrai dire au revoir à des gens, je ferai semblant d’aller aux toilettes et j’en profiterai pour m’enfuir. Je me cacherai dans ma valise. En plus quand on me dit des trucs gentils, des fois ça fait ressentir des émotions, et j’aime pas. J’aurais du naître sous la forme d’un mec caillou. Ca aurait été plus facile.
- Par contre, j’aime pas non plus qu’on me dise des trucs méchants.
- En une semaine, j’ai du dire adieu à environ 363 personnes. Je n’exagère presque pas : c’est ce qui arrive quand on a l’habitude de raconter sa vie à la moitié des clients du Super U où l’on travaille, mes enfants. J’ai quand même eu droit à de magnifiques discours lors des derniers passages en caisse, dont celui d’un « fervent féministe » qui « voue un culte à Simone Veil dont il a un poster dans son salon » et qui est bien content « qu’une femme comme vous puisse aujourd’hui faire des études », parce que comme ça il « n’a pas fait mai 68 pour rien ». 100% véridique. Dans la liste de ceux qui ne vont pas me manquer, par contre, on ne manquera pas de citer la mamie qui a promis de voler deux pommes la prochaine fois parce que je lui ai volé 72 centimes (pas vrai), le vieux qui faisait des blagues machos à forte connotation seksuelle, et les deux ploucs suprêmes (le premier avec l’accent alsacien, le second avec l’accent vosgien) qui ont testé tout le manuel « La drague pour les Nuls » sur moi :
« Héééééé Kaétan ?
- Hein ?
- Tu trouves pas toi, que Liiiiissa c’est aussi un choli prééénom ?
- Aaaah oui. Et puis il est aussi porté par une chaaaarmante demoisselle, hein, c’est pour ça. Hé, Madmoisselle ?
- Euh. Oui ? [Ne pas rire. Surtout ne pas rire. Penser à des choses tristes pour ne pas rire. Penser à des animaux qui meurent. Pourquoi j’ai mis mon badge, bordel ?]
- Vous voulez pas aller dansser avec lui ce soir ? [Montre son pote du doigt, qui sourit béatement]
- Euh. Non. Suis pas là ce soir.
- Aaaah mais vous êtes où ?
- Euh. Je sais plus. Mais c’est loin.
- Oooh c’est dommache. Parce que sinon, on fous aurait cherché avec la moto hein. »
La fois d’après, ils m’ont invité à la fête des conscrits, la fois d’encore après, à une fête dans un garage. Je n’ai pas voulu savoir à quoi ressemblait leur garage.
Et le top 3 des meilleures phrases qu’on m’ait dites pour mon départ :
=> "Te fais pas violer là-bas hein" (après que je me sois fait accoster dans les chiottes d’un restau plus tôt dans la soirée. Celui-là avait aussi lu La Drague Pour les Nuls).
=> "Le jour où j’aurai une belle fille, j’espère qu’elle sera aussi gentille que toi". (Ooooh non, oooooooh non, pas de phrases gentilles, qu’est ce que c’est que ça, déjà je suis exécrable comme fille hein, et puis ensuite, faut pas me dire des trucs gentils sinon je ressens des émotions, silence, tout de suite).
=> "Ne te perds pas trop" (de la part de ma gardienne de cactus (le jaune, c’est Pepito, le rose c’est Pepita et le rouge c’est Roberto, et tu n’oublies pas de leur parler tous les jours sinon ils sont tristes) qui n’a pas su elle-même expliquer ce qu’elle voulait dire par là)
Voilà... Le départ c'est demain matin tôt, j'ai eu un espèce de choc quand j'ai vu la pile de valises tout à l'heure, ça rend les choses réelles. Mais là je ne les vois plus, alors ça va. Ma chambre a étrangement l'air rangée, même si vide semble le mot le plus approprié.
Bonne nuit!